Qu’en est-il de l’efficacité de la TV 8?
Après des années de difficultés, accompagnées d’une controverse sans précédent, le Maroc a lancé la première chaîne de télévision parlant la langue amazighe.
Le contenu de cette chaîne a été mis en lumière dès les premiers mois de sa diffusion. Des organisations amazighes ont émis des déclarations et des observations depuis le premier mois de sa diffusion, exprimant le souhait qu’elle n’adopte pas les mêmes erreurs que les deux premières chaînes officielles de la SNRT en rapport avec le traitement des sujets liés à l’amazighité.
Ces erreurs sont principalement liées à la minimisation de la culture amazighe en un spectre folklorique, qui passe inaperçu à travers la vulgarisation des arts et chansons populaires. Lesdites erreurs effleurent aussi l’absence d’équilibre entre les trois variantes amazighs répandus au Maroc. De plus, ces chaînes ne respectent pas l’espace alloué à l’amazigh dans leurs cahiers des charges respectifs.
La TV 8 – après tout ce trajet herculéen – risque de ne pas refléter la culture amazighe tant souhaité, sinon passer pour un outil de traduction des chaînes arabes déjà existantes. Tamazighte est donc dans la même situation que les autres chaînes marocaines, n’ayant pas la liberté de s’exprimer sur l’identité amazighe au Maroc, se limitant principalement au folklore.
Tamazight fait face à des critiques concernant également ses programmes qui n’ont pas réussi à briser l’isolement du citoyen amazigh vivant dans les régions reculées en présentant des programmes reflétant sa vie quotidienne simple, alors que la TV 8 s’est concentrée sur la vie des citoyens dans les grandes villes telles que Rabat et Casablanca.
Le débat sur les perspectives de développement de cette chaîne et son avenir a été ravivé juste après que la nouvelle constitution marocaine a déclaré que la langue amazighe est une langue officielle du pays aux côtés de l’arabe, et encore plus après l’adoption des deux lois organique, l’une N° 26.16 relative au processus de mise en œuvre du caractère officiel de l’amazighe, ainsi que les modalités de son intégration dans l’enseignement et dans les domaines prioritaires de la vie publique, et l’autre loi N° 04.16 portant création du conseil national des langues et de la culture marocaine.
La question qui se pose est de savoir dans quelle mesure la chaîne a réussi à atteindre les objectifs qui lui étaient fixés, et comment cela va affecter les médias en général, et en particulier les médias amazighs.
Un autre défi majeur pour la chaîne toujours en instance, est celui de la création d’une langue unifiée, ou ce que l’on appelle au Maroc une « langue standard », qui respecte la diversité des trois variantes amazighes de manière à la rendre claire et compréhensible pour tout les Amazighs, quel que soit leurs parler; toutefois, la création d’une langue amazighe unifiée n’est pas du ressort de la chaîne amazighe certes, mais de celui de l’Institut Royal de la Culture Amazighe, un projet majeur nécessitant du temps pour être réalisé.
Le mouvement amazigh au Maroc réclamait depuis ces premiers pas et depuis longtemps l’intégration de l’amazighe dans les médias. Le premier pas vers la création d’un bulletin d’information en amazighe à la télévision remonte au roi défunt Hassan II en août 1994.
Cependant, la décision politique la plus importante a été prise par le roi actuel Mohammed VI le 17 octobre 2001, lorsqu’il a appelé à la promotion de l’amazighe dans les domaines de l’éducation, des médias et de tous les aspects sociaux. En conséquence, un espace a été alloué à l’amazighe dans les programmes des chaînes marocaines, bien que les activistes amazighs les accusent de ne pas respecter la proportion allouée et de se limiter au folklore en ce qui concerne leur traitement des sujets amazighs.
- Lahoucine Oublih
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