Politique

Le Professeur Abdellatif FEkkak: « Regards sur les générations X,Y et Z »..

Interview avec le Pr. Abdelatif FEKKAK

  •  Par Mohamed Laghouizi //

Suite aux événements qu’a connus le Maroc durant le mois d’octobre, nous avons invité le Professeur Abdellatif FEkkak pour nous parler de l’évolution de la GEN Z ainsi que ses ambitions suite aux manifestations qu’elle avait menées.

Pr Abdelatif FEKKAK qui est, ex-Professeur  et chef de département de ‘’Politique Générale et Stratégie des Organisations’’ et Directeur de recherche des thèses de Doctorat de l’Ecole Doctorale du Groupe de L’ISCAE, est détenteur d’un triple Doctorat : Sociologie Politique et Relations Internationales (76 à Paris X Nanterre), un Doctorat es Sciences de Gestion et d’Organisation (85 Paris IX Dauphine) et d’un Doctorat d’Etat en Sciences économiques 98 (Univ Hassan II Casa), Il est consultant en Formation, en stratégie, et organisation avec la BM, FMI, PNUD, FAO et BAD.

Le Professeur Abdellatif FEkkak: "Regards sur les générations X,Y et Z".. - agadirtoday.com1/ Question : Au-delà du seul usage du numérique, et en dépit de l’âge de la génération X,Y, et Z qui diffère profondément d’une génération à l’autre,  pouvez-vous donner à nos lecteurs  votre point de vue sur ces faits ?

Pr Abdelatif FEKKAK : Oui, commençons d’abord par la connaissance des concepts : les sociétés occidentales adoptent une classification alphabétique pour décrire les générations.

1/ La génération X (1965–1980) apparaît dans un contexte de désindustrialisation et de crise des idéologies. Ce concept a été popularisée par le sociologue Douglas Coupland, Cette génération   marquée par le doute, le scepticisme envers les institutions politique et une quête d’individualité, a grandi après les Trente Glorieuses en Europe, avec un sentiment de perte de repères de la société d’ordre psychologique et de recul des certitudes économiques et sociétales.

Au Maroc, cette période correspond aux émeutes des années 80 de la faim, due à la montée des prix du pain et de la céréale. Cette Jeunesse exigeait ‘’du pain’’. C’est une génération qui a besoin qu’on soit dernière elle pour travailler.  Elle a besoin de l’image de l’autorité du Père, du Prof et de la Protection des autorités publiques. Elle est frileuse.

Elle a besoin de ‘’caresse mentale ‘’pour avancer dans ces études, pour la recherche du travail. Elle a développé le népotisme, le clientélisme, le favorise, le régionalisme.

2/ La génération Y (1981–1996) a grandi avec la naissance de la mondialisation sans frontière culturelle, sans frontières des images télévisuelles, sans frontières économiques avec les signatures de l’OMC, influencée par l’émergence d’Internet, l’arrivée du Portable, le début de la technologie numérique et l’ouverture culturelle par satellite des chaines paraboliques.

Cette génération se caractérise par une forte connectivité, un esprit collectif et un désir de sens dans le travail. Les Millenniales  (ou Gen Y) sont également les premiers à vivre la transition entre un monde analogique et numérique, ce qui leur confère une position intermédiaire entre les générations précédentes et suivantes.

Cette génération Y est plus indépendante contrairement à la Gen X, grâce à la politique de l’éducation et les devoirs qui se font sur place à l’école et non à la maison. Car ceux qui réussissaient bien et mieux étaient les enfants des parents intellectuels qui les assistaient le soir avec d’aller dormir.

Mais les enfants dont les parents de la classe moyenne ne sont pas conscients, ils échouent. La nouvelle réforme scolaire en Europe est d’obliger et d’assister les élèves à faire les devoirs à l’école pour garder l’homogénéité des classes avec le même niveau scolaire.

C’est la nouvelle réforme de la politique éducative des années 1980. Les grandes écoles et les RH dans les entreprises cherchent plus les Gen Y plutôt que la Génération X (des enfants et des parents que l’école ne comprend pas). La génération est indépendant, elle réussit partout, là où vous la mettez.

Ce sont des 4X4 tout terrain, des VTT, on a pas besoin d’être dernière eux (filles et garçons), c’est la même chose en Europe et au  Maroc pour les classes favorisées.

La génération Z (1997–2012), en revanche, est la première à être véritablement façonnée par le numérique. Nés avec les smartphones, les réseaux sociaux et la connexion permanente, ses membres ne se sont pas adaptés au digital : ils y ont été socialisés dès l’enfance.

Cette génération se distingue par sa rapidité d’adaptation, sa maîtrise technologique, mais aussi par une conscience sociale accrue face aux enjeux climatiques, identitaires ou d’égalité. Elle précède la nouvelle génération dite Alpha (Ière lettre en langue grecque), entièrement immergée dans un monde d’intelligence artificielle et d’hyper-connectivité.

Si ces nouvelles classes digitales des nouvelles sociétés numériques qui, sont largement reprises par les médias et le marketing pour comprendre les comportements et valeurs, leur validité scientifique est discutée, simplifient des réalités complexes et ne reflètent pas les différences de classe, de genre ou de culture des sociétés traditionnelles horizontales et tribales.

Question 2 : Pourquoi la Génération Z en particulier s’est traduite par une fracture sociétale politique qui masque des inégalités digitales (Education, santé, justice, corruption, etc.. d’un Etat social qui ne remplit pas son devoir politique ?

 Pr A/FEKKAK : L’analyse interne de votre question laisse supposer ou confirme l’analyse de l’examen d’une émergence d’une fracture intergénérationnelle dont les causes et les effets sont en particulier accentués par la nouvelle société numérique.

Cette question n’est pas à l’abri des interrogations croisées  de la sociologie des générations, de la psychanalyse et de la psychologie de la fracture politique intergénérationnelle pour comprendre comment les générations Z redéfinissent leur rapport à l’histoire de leur pays, rapport avec les institutions et  l’autorité présente des Partis Politiques et comment imaginez le futur avec elles.

A cet égard, il faut savoir que Le Royaume du Maroc est considéré comme l’un des pays les plus dynamique dans la sphère de la Méditerranée du Sud où les conflits de générations X, Y et Z risqueraient de dégénérer tant à l’étranger qu’au Royaume du Maroc. Que se passe-t-il ?

C’est le paradoxe du Maroc avec une société à deux vitesses,  avec des inégalités des territoires entre la grandeur et la décadence avec une forme de progrès spectaculaire pour la jeunesse et les femmes, une exceptionnalité dans le monde arabe et africain, mais il y a aussi une exceptionnalité des inégalités territoriales et une visibilité de la pauvreté et du chômage avec des points inadmissibles au niveau régional de l’ordre de 35% d’autant plus choquante, que personne n’est dupe des nouvelles promesses  des partis politiques   du Maroc incrédules et incroyables.

3/ Comment caractériseriez-vous les aspirations de la génération Z marocaine ?

Pr. Abdellatif Fekkak  : La génération Z -caractérisée typiquement par la génération des personnes nées entre la fin des années 1990 et le début des années 2010 -incarne au Maroc un carrefour d’aspirations contrastées dans une société paradoxale et névrosée.

D’un côté, elle a grandi dans un pays qui a connu des progrès vertigineux : accès accru à l’enseignement, connectivité numérique, ouverture culturelle. De l’autre, elle se heurte à des obstacles persistants : chômage élevé des jeunes, précarité de l’emploi, inégalités territoriales.

C’est ce que j’appelle ‘’la névrose de la classe politique oligarchique’’, trop riche la pauvre par la corruption, et l’arrivisme.

Dans les médias marocains, on note une montée de la mobilisation de cette génération Z autour d’un ‘’contrat social’’ renouvelé : l’idée que le pays lui doive ‘’une digne constitutionnelle et démocra-tique’’, un emploi décent, une protection sociale de la santé et une éducation de qualité.

A ce titre, l’aspiration centrale de la génération Z et des Marocains de l’étranger dans le monde semble moins être une révolution radicale que la demande d’équité, de méritocratie réelle, de participation.

Des jeunes disent qu’ils ne se reconnaissent plus dans les formes traditionnelles d’engagement ou de promesses politiques creuses des partis politiques mais veulent que les résultats soient visibles : « Moins de stades, plus d’hôpitaux ».

Courrier International : « Italie, ce pays où les jeunes “ne font rien” » — article décrivant le taux élevé de jeunes inactifs en Italie, parmi les plus élevés en Europe. (Courrier international).

The Guardian : « UK faces youth jobs crisis as number of ‘neets’ rises to almost 1 m » — sur la situation au Royaume-Uni, environ un million de jeunes 16-24 ans non engagés dans études, emploi ou formation. (The Guardian). The Guardian : « Labour urged to rethink scrapping minimum wage youth rates amid ‘Neets’ rise » — porte sur la politique des salaires minimums pour les jeunes dans le contexte d’une montée des NEETs. (The Guardian).

Pour résumer : la génération Z marocaine veut que le Royaume du Maroc tienne ses promesses politiques et de l’Etat social, elle souhaite une insertion réelle des jeunes marocain de l’intérieur et de l’étranger dans l’économie, un rôle actif dans la société civile, et la reconnaissance de sa voix dans les institutions à caractère électif, en tant que citoyen marocain à part entière, non juste comme des ‘‘jeunes de la génération X,Y ou Z à former  et à prendre en charge’’.

          

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